L’incongruité dans « Comic Strip » (1967)

L’incongruité dans « Comic Strip » (1967)

 

« Comic Strip » est une chanson française composée par Serge Gainsbourg en 1967. La chanson figure sur l’album « Initials B.B. » qui fait référence à la célèbre actrice, chanteuse, et mannequin Brigitte Bardot. Gainsbourg chante avec la choriste Madeline Bell dans la version originale mais dans la vidéo musicale Bardot apparaît comme choriste. Il est important de noter que pendant ce temps-là Gainsbourg et Bardot avaient une liaison amoureuse courte mais passionnée. Le clip vidéo correspond aux paroles de la chanson dans la mesure où Bardot est montrée comme un personnage principal dans une bande-dessiné.

Pendant les années 50s il y avait beaucoup de changements sociaux à cause de la fin de la seconde guerre mondiale. Un sentiment collectif d’optimisme a commencé à apparaître dans la société française. De plus, l’amélioration des conditions quotidiennes a permit aux gens d’avoir plus de temps pour faire des activités de loisir. On peut voir les nouvelles valeurs de la société de loisir dans les paroles et la vidéo musicale de « Comic Strip ». Par ailleurs, le style des images créées dans la vidéo semble refléter l’influence du mouvement du pop art qui était populaire en France pendant les années 60s. Pendant les années 60s la bande dessinée devient très populaire et a été influencée par les nouvelles valeurs de l’époque. En fait, les parallèles entre le personnage de Bardot et Barbarella, une héroïne de bande dessinée, par exemple, reflètent le mouvement vers la liberté sexuelle et la révolution des mœurs. Bien que les deux soient des modèles de beauté féminine, elles sont toujours indépendantes et ouvertement sexuelles. Donc le personnage de Barbarella a probablement été inspiré par Bardot et les deux deviennent la quintessence de la femme moderne à l’ère de la révolution sexuelle.

Je pense que c’est intéressant de voir la vidéo qui accompagne la chanson « Comic Strip » comme un reflet des sentiments de l’époque où elle a été crée. Une connaissance de la popularité de la bande dessinée et de la célébrité Brigitte Bardot permet de contextualiser la chanson et de trouver l’humour dans la vidéo. Par exemple, la représentation du personnage de Bardot dans la vidéo est vraiment comique avec la connaissance de son rôle en tant que symbole sexuel international. En portant une combinaison qui couvre complètement son corps, elle ne paraît pas vraiment sexy ou séduisante. Donc il semble un peu bizarre et incongru que Gainsbourg ait fait ce portrait peu flatteur de Bardot parce qu’elle est célèbre pour être un sexe-symbole. Alors, si on a une connaissance de la signification de Bardot pendant les années 60s, cette représentation de Bardot ne répond pas aux attentes et suscite probablement souvent le rire.

La juxtaposition entre Serge Gainsbourg et Brigitte Bardot est une des choses la plus frappante dans la vidéo musicale. Les gestes dynamiques de Bardot offrent un contraste saisissant avec le comportement de Gainsbourg. Il paraît complètement nonchalant lorsqu’il marche autour de la scène, contrairement à Bardot qui prend des poses dramatiques et incarne un personnage de bande dessinée. De plus, alors que la présence engageante de Bardot attire l’attention des spectateurs, Gainsbourg ne la regarde pas. Ces juxtapositions crée un effet assez comique, car même s’il semble incongru de mettre ces deux personnages ensemble, les deux étaient un couple quand cette vidéo a été faite. Donc avec cette connaissance, la vidéo devient drôle parce que cette représentation de leur rapport dans la vidéo est complètement l'inverse de la réalité.

La composition de la musique et des paroles soulignent cette juxtaposition entre les deux personnages. Gainsbourg chante les paroles pour la plupart de la chanson et invite le public à « venir dans [son] comic strip ». En revanche, Bardot joue un rôle très curieux dans le duo en ajoutant des onomatopées au long de la chanson. Au lieu de chanter les paroles, elle dit seulement des expressions comme “shebam,” “pow” et “wizz.” Cela me semble bizarre que son seul rôle dans la vidéo est de dire ces mots parce qu’elle est chanteuse. Pourtant, cet aspect de la chanson devient plus drôle quand on considère la fonction des onomatopées dans les BDs. Il est important de noter que se sont des mots qui simulent des bruits produits dans la BD et que généralement les lecteurs ne les lisent pas à haute voix. La répétition des onomatopées devient absurde parce que les mots ne sont plus utilisés pour imiter les sons produits dans la BD. De plus, elle dit ces mots d’une manière pince-sans-rire, ce qui ajoute un autre aspect de l’humour parce qu’elle paraît très sérieuse en disant des choses assez absurde.

Sans une connaissance du contexte culturel des années 50s et 60s, il pourrait être difficile de trouver l’humour dans cette vidéo. La première fois que je l’ai vue j’ai ri mais ne pouvais pas identifier exactement pourquoi. Mais après avoir réexaminé la signification culturelle de Bardot et de la bande dessinée, les éléments comiques deviennent plus évidents et plus facile à identifier.

Gainsbourg, Serge

Initials B.B., le huitième album de Serge Gainsbourg

Juillet 1967

Claude Dejacques, Madeline Bell, Brigitte Bardot

2:07 minutes